dimanche 13 février 2011

LE VERDINASO ET L IDEOLOGIE NATIONAL-SOLIDARISTE.

Au cœur de l'idéologie national-solidariste

En Flandre, au début des années trente, un nouveau courant politique allait apparaître : le national-solidarisme. Autour de son idéologue et «guide» : Joris van Severen. Avec le Verdinaso, son mouvement, il préconisait la création d'un «Etat thiois». Sous le modèle d'un régime autoritariste d'Ordre nouveau. Rappel politique et historique.



Meeting du Verdinaso, dans les années trente.


Le national-solidarisme s'est développé en Flandre dans les années trente. Au même moment, en Allemagne, le national-socialisme prenait le pouvoir. Les initiales – NS - de ces deux idéologies radicales sont identiques. Leurs noms, très proches. Leur finalité commune est la prise du pouvoir et l'instauration d'un Etat autoritaire. Des similitudes qui ne sont pas dues au hasard.

En octobre 1931, une nouvelle organisation politique flamande voit le jour dans le nord de la Belgique. Elle s'appelle Verbond der dietsche nationaal-solidaristen (en français : Ligue des nationaux-solidaristes Thiois). Cette organisation sera mieux connue sous ses initiales : Verdinaso. Ces dernières donneront naissance au terme «Dinaso» qui lui aussi désignera l'idéologie national-solidariste. Active en Belgique, mais aussi aux Pays-Bas, au moment de son apogée, la Ligue des nationaux-solidaristes Thiois sera forte de plus de 10 000 militants.
Le Verdinaso est dirigé par Joris van Severen (1894-1940). Une personnalité aux multiples facettes. Ancien combattant de la Guerre 14-18, cet homme de caractère devient député en 1921 sous les couleurs du Frontpartij (le parti des anciens du front). Idéologue nationaliste et dirigeant politique, van Severen allia la réflexion à l'action. Il avait l'étoffe d'un véritable «guide». Son Verdinaso apparait à un moment opportun : l'entre-deux-guerres est bénéfique aux mouvements radicaux, à la fois ceux qui sont révolutionnaires et ceux qui, par auto-défense, sont contre-révolutionnaires. Le Verdinaso est un mouvement nationaliste flamand pur et dur, autoritariste et militariste. Ses militants portent un uniforme fort proche de celui des milices fascistes italiennes et des organisations nazies allemandes.
Influencé par les théories maurrassiennes, comme une bonne partie de la droite national-catholique, Joris van Severen est partisan d'un régime politique d'Ordre nouveau, dont le socle serait un ordre corporatiste, sous le contrôle de l'Eglise catholique. Le national-solidarisme est une idéologie prônant un système autoritaire de planification socio-économique. Il revendique un modèle d'entité organique : la solidarité de toutes les classes sociales entre elles pour le bien de la nation. Une nation qui se transformera en autarcie hyper-hiérarchisée. Où les opposants seront neutralisés d'une manière ou d'une autre. La doctrine national-solidariste est caractérisée par son rejet à la fois du marxisme et du capitalisme international, comme l'est le corpus national-catholique.
La propagande raciste se développe fortement dans les rangs du Verdinaso. Les Juifs y sont ciblés comme de dangereux étrangers. Des comptes rendus officiels du NSDAP, le parti nazi allemand d'Adolf Hitler, sont régulièrement publiés dans «Hier Dinaso», le journal du mouvement. «Le bolchévisme est le pouvoir le plus abject et le plus sanglant que la terre ait jamais connue, (...) que les Juifs ont mis en place dans le but de s'arroger une autorité incontestable», peut-on lire dans un discours du nazi allemand Josef Goebbels reproduit intégralement dans «Hier Dinaso», le 12 décembre 1936. La croisade contre les ennemis de la Nation se poursuit : des listes de Juifs et de francs-maçons sont publiées par le Verdinaso dans sa presse.


Symbole du Verdinaso et différents portraits de Joris van Severen, guide et idéologue de ce mouvement national-fasciste flamand.



Pour une monarchie autoritaireDans ses premières années d'activité, le Verbond der dietsche nationaal-solidaristen de van Severen préconise la fin de l'Etat unitaire belge. A sa place, il plaide pour la création d’un «Etat thiois» pan-néerlandais. A la base de la constitution de ces «Grands Pays-Bas» : les trois Flandres. Celles de Belgique, de France et des Pays-Bas. Van Severen est considéré comme le père spirituel du slogan «België Barst !» (La Belgique ? Qu'elle crève !). Apparu en 1928, il est resté depuis, et jusqu'à aujourd'hui, celui des radicaux du mouvement nationaliste flamand.

En 1934, Joris van Severen adopte cependant un tournant géostratégique important. L'Etat thiois ne se limitera plus qu'aux trois Flandres, il englobera aussi la Wallonie et le Luxembourg. Pour l'idéologue du Dinaso, le «peuple thiois» est en effet constitué des Flamands, des Brabançons, des Limbourgeois, des Zélandais, des Hollandais, des Frisons, des Gueldroits, des Hennuyers, des Liégeois, des Luxembourgeois et des Namurois. Ensemble, ils formeront un empire national-solidariste.
Quant à l’État belge, il ne sera plus jugé comme un obstacle par van Severen qui s'éloignera ainsi des thèses séparatistes des nationalistes flamands. Le chef du Verdinaso préconise une monarchie détenant un pouvoir absolu, au-delà de la droite et de la gauche. Ce scénario est celui défendu par la droite monarchiste antiparlementaire, les fascistes de la Légion Nationale de Paul Hoornaert, le théoricien du nationalisme belge Pierre Nothomb et les «socialistes nationaux» du Parti ouvrier belge conduits par Henri De Man, ainsi que Léopold III en personne.
Face à la menace nazie et aux invasions militaires de l'Autriche (en 1938) et de la Pologne (en 1939), Joris van Severen et son mouvement plaident pour la neutralité du pays dans le conflit qui s'annonce, comme Léon Degrelle, le chef du parti Rex. Avec ce dernier, le jour de l'invasion allemande, le 10 mai 1940, le dirigeant du Verdinaso est arrêté sous les ordres du gouvernement belge. Les arrestations de ces dirigeants de la droite radicale antidémocratique visent à neutraliser de manière proactive de potentiels alliés de l'ennemi. Envoyé à Abbeville, dans le nord de la France, van Severen y est tué par des militaires français qui le gardaient. Officiellement, il s'agit d'un fâcheux accident. Les soldats en question, ivres mort au moment des faits, auraient commis une bavure. Ses partisans dénonceront un assassinat.


Rassemblement du Verdinaso en 1934. A droite, défilé de sa milice paramilitaire, le Dinaso militanten orde (DMO)... Plusieurs années plus tard, il sera créé le Vlaamse militanten orde (VMO), l'organisation de référence de l'extrême droite flamande de l'Après-guerre.


Solidaristes et rexistesDurant l’occupation nazie de la Belgique, une poignée d'activistes nationaux-solidaristes vont rejoindre les rangs de la résistance d'ultradroite patriotique «anti-Boches». Mais une autre partie des militants du Verdinaso se rallieront au Vlaams national verbond (VNV), le plus important parti d'extrême droite des années trente, devenu le fer de lance de la collaboration en Flandre.

Dans les rangs du mouvement rexiste, il y aura quelques partisans de Joris van Severen. Ce fut le cas de John Hagemans. Nommé «Prévôt de la Jeunesse», en 1940, par Léon Degrelle, sa mission était d'embrigader des jeunes militants. En 1941, la Jeunesse rexiste (JR) qu'Hagemans avait fondée, se transforma en Organisation de la Jeunesse nationale-socialiste (OJNS). Le chercheur spécialiste des mouvements collaborationnistes wallons, Eddy De Bruyne, notait à son propos : «Hagemans rêvait de former une jeunesse politique à idéologie nationale-socialiste basée sur (notamment) l'idée bourguignonne, rêve de Joris van Severen dont il était un disciple et qui devait conduire à la reconstitution des XVII Provinces» (E. De Bruyne : «Les Crises internes de la Légion Wallonie», Thèse 388. CEGES, Bruxelles, 1990). En août 1942, John Hagemans prit la tête d'une légion de jeunes rexistes qui partit sur le front de l'Est pour combattre l'Armée rouge. Le 26 août de la même année, il y fut tué. (il est également question de John Hagemans dans l'article «Les disciples francophones du national-solidarisme» de ce présent dossier)

Survivance du solidarisme La fin de la guerre, la libération du pays et la répression de la collaboration ne signifieront pas pour autant la disparition du national-solidarisme. Il ne faudra attendre que très peu de temps pour que les fidèles partisans de van Severen se réorganisent. Parmi eux, se comptent des Flamands, mais aussi des francophones, comme le montre un des autres articles de notre «dossier National-Solidarisme».

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