mercredi 16 février 2011

revolution du monde arabe

Les questions sont souvent plus intéressantes que les réponses, et en tout cas plus révélatrices.

Au-delà des réjouissances plus ou moins sincères qui ont accompagné les soulèvements récents en Tunisie et en Egypte, des lignes de fracture demeurent et interdisent un consensus quant à l’interprétation à donner à de tels évènements historiques.

L’aveuglement, jusqu’à la bévue, dont ont fait preuve les responsables politiques, et singulièrement leurs services de renseignement, leurs ambassades, leur personnel des Affaires étrangères, leurs « conseillers », montre à quel point le prisme idéologique prime sur une vision réaliste de la situation. L’unique différence entre les chancelleries s’est traduite dans l’accompagnement de changements, qu’on ne pouvait plus éviter. Parce qu’il ne faut jamais insulter l’avenir, ils doivent subir un traitement aussi bien administratif que propagandiste. Ainsi a-t-on vu Obama, comme la mouche du coche, faire écho aux revendications populaires et abandonner ceux qui avaient bien servi l’Amérique, donnant de ce fait aux laquais un avant-goût de ce qui peut à terme leur arriver. La gratitude n’est pas une vertu géopolitique.

Quant aux dirigeants du reste du monde, soit ils étaient mus par leur intérêt bien compris, le danger rendant lucide, soit leur exclusion du théâtre historique les laissait muets, avant qu’ils n’entonnent un air dicté par le chef d’orchestre américain, le véritable maître de l’Occident. D’une part, Israël a manifesté son appréhension, et a pris des mesures en augmentant substantiellement son financement guerrier, d’autre part, la pauvre Europe, après un temps de retard (histoire de bien entendre la voix du Maître) a repris, pianissimo, la chanson américaine. Elle ne pouvait en effet que balancer l’encens « démocrate » etc., sans aucune espèce de vergogne, elle qui, comme presque tout le monde, avait connu son histoire d’amour avec Moubarak et Ben Ali.

Seuls les naïfs s’étonneront que ce que l’on reproche maintenant à ces régimes corrompus, antidémocrates, méprisant leurs peuples à un degré rarement atteint, était ce qu’on faisait mine de dénoncer en Iran ou en Syrie, avec force trompette et casseroles médiatiques. Il était évident que les rôles devaient être distribués en fonction des intérêts, et que l’Egypte, la Tunisie, la Jordanie, ainsi d’ailleurs que cette clique faisandée et pourrie des pieds à la tête, que l’on appelle encore l’ « Autorité palestinienne » (expression qui présente une contre vérité pour chacun de ses termes) se trouvaient obligatoirement dans le camp du Bien, c’est-à-dire dans celui d’Israël. Quant à l’Iran et la Syrie, ce sont des Etats stables, car fidèles à leur destinée historique.

Il faut laisser de côté l’argument officiel, celui d’un anti-islamisme affiché, pour expliquer le soutien dont bénéficiaient ces régimes, d’un bout à l’autre de l’arc méditerranéen. L’Arabie salafiste est tout aussi fondamentaliste que le chiisme, et soutenait farouchement un Moubarak qui, lui-même, comme la mafia qui gouverne l’Algérie ou le Maroc, instrumentalisait l’islam pour diviser le peuple et bénéficier d’une sympathie à bon compte. De même les attentats anti chrétiens, comme celui du Caire qui fit vingt et un morts dernièrement, venaient à point pour justifier la répression et le contrôle policier. Les gouvernements occidentaux n’allaient pas y regarder de si près… La fraternisation entre Chrétiens et musulmans durant les manifestations de la place Tahrir au Caire remet les choses à leur place.

La « jurisprudence » révolutionnaire apprend à la longue. On comprendra qu’un phénomène d’une telle ampleur se déploie dans la durée, et que ses conséquences ne sont pas encore apparues. Les USA font le pari d’un contrôle et d’une manipulation qui, à terme, assurera à la collaboration des nouveaux régimes une nouvelle vivacité. Les sionistes sont peut-être plus avisés, et possèdent une intelligence sans doute plus aiguë de la « rue arabe ». Ne craignent-ils pas un réveil de son orgueil, de sa fierté ? Seuls des « Identitaires » obtus et appâtés par les sirènes droitistes peuvent, en Europe, craindre le « danger islamiste ». Soyons plus humbles ! Les mouvements d’outre-méditerranée non seulement sont dignes d’admiration, pour leur courage et leur maturité (pensez donc : des Arabes !), mais ils nous montrent la voie.

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