lundi 17 janvier 2011

PAS UN EURO DE PLUS...

Le journal Nice-Matin vient courageusement de calculer le coût de l’euro (1). Tout a augmenté en France entre 100 et 600 % en dix ans grâce à cette monnaie, à l’exception de quelques factures EDF, des vols Paris-Nice, et, sans blaguer, du camembert. L’optimisme médiatique prétend que sur la côte d’azur l’immobilier a pris 118 %, alors que tout le monde sait qu’ici on compte couramment en euros, comme à Paris, ce qu’en 1995 ou 96 on comptait en francs.
Les impôts locaux ont pris 70%, l’heure de mécanicien aussi, le Nutella a doublé, la laitue a triplé, les lardons ont pris 130%, et j’en passe… Les prix des restaurants, des produits de boulangerie et bien sûr des spectacles, ont aussi fait un bond conséquent en avant, jusqu’à payer six fois plus cher pour voir et entendre la vioque idole Bono, ou celle nommée Madonna. Je sais, c’est la faute au pétrole, aux Chinois et aux Arabes…
Mais puisqu’on nous disait que l’euro devait empêcher l’inflation ! Trois jours de salaire pour un plein d’essence, quinze ans pour un petit appartement à Paris, mais qui dit mieux vraiment ? Quels salaires de la peur ! Comme cela le gouvernement peut profaner les styles de vie, pardon « briser les tabous », comme le dit sans impudence le journal collaborationniste Les Echos : à savoir retarder l’âge de la retraite et augmenter les impôts en toute impunité. C’est cela aujourd’hui, « briser les tabous » : réduire à la portion congrue les plus pauvres, soit 90% des gens, les salariés de la peur. Encore un peu de flexibilité, cela nous « knoutera » moins cher…
L’euro a à peu près ruiné l’Europe, compromettant en outre durablement sa croissance. C’est la monnaie allemande que l’on a donnée à tout le monde, et seuls les Allemands connaissent une croissance correcte aujourd’hui, parce qu’ils ont la première, voire la seule industrie du monde, et parce qu’ils ont aussi accepté dix années de vaches épouvantablement maigres.
L’euro a bien sûr ses cerbères et ses fins limiers : ING Bank nous prévoit une baisse de PNB de 10% en trois ans si nous quittons l’euro ! Ce sont les mêmes foutriquets qui, sous le fouet de la menace, nous ont recommandé d’y entrer, histoire de tripler la dette de la Grèce, de l’Irlande, de l’Espagne ou de l’Italie, plus vieux pays de l’Europe, et de facturer ensuite aux contribuables appauvris et soumis la gabegie des banques et des copains des gouvernements… Et il se peut que l’euro disparaisse, entraînant notre ruine à tous, mais ce ne sera pas tout de suite : tant qu’il y a du jus à presser, n’est-ce pas, ne nous pressons pas trop…
L’euro, symbole de la destruction des peuples de l’Europe
Lâcher l’euro, une faute ? En Amérique du sud, j’ai vu la fin du « uno por uno », du « un peso argentin pour un dollar » qui avait ruiné ce pays. En dix ans le PNB a triplé et l’Argentine exporte ses produits agricoles un peu partout dans le monde. Cette année, dix ans après la « dévaluation », la croissance de la république argentine a été de 12%. La ruine, vraiment, de dire non au diktat monétariste ?
L’euro n’est pas une monnaie forte, c’est une monnaie chère, c’est surtout une monnaie irréelle (j’aime la définition borgésienne de l’enfer : c’est, comme l’Allemagne nazie,  « un lieu irréel »). Un autre pays d’Amérique du sud avait lourdement pâti de la dollarisation de son économie : l’Equateur, qui non seulement avait vu comme nous ses prix tripler en six mois à l’époque, mais aussi en a perdu son âme. Et cela je le sais.
Car une monnaie a une valeur traditionnelle et sacrée et ce n’est pas impunément que l’on y touche ; l’euro a altéré culturellement les peuples de l’Europe.
Léon Bloy voyait d’ailleurs dans l’argent le sang du pauvre, et quand on saigne le pauvre, on n’est pas loin de le tuer. Et on a vu ce que la libéralisation de leur économie a coûté aux pays de l’ex bloc soviétique : vingt millions d’âmes. Mais qu’est-ce qu’on ne ferait pas pour faire plaisir aux marchés et à Goldman Sachs, au nom des thérapies de choc ou du vieux docteur Knock…
Passons au symbolisme. Evalué à 6,56f (6,66, cela aurait fait trop visible, non ?), l’euro a aussi symbolisé la destruction des peuples de l’Europe ; il a été salué par la laideur immonde de ses billets, par le ricanement de Chirac en voyant ces répugnantes coupures qu’il avait tant désirées pour la première fois, par la sottise de Nicole Fontaine incapable d’utiliser son distributeur de biftons il y a huit ans, ou par la mort inexpliquée de Wim Duisenberg au bord de sa piscine du Luberon.
Cette monnaie, qui devait porter d’abord porter un nom parodique (celui royal et médiéval d’écu !) sur commandement giscardien, aura servi au meurtre rituel, à la fois physique et spirituel, de nos nations. Sans doute sommes-nous trop morts pour nous en rendre compte, comme le pensait mon cher Philippe Muray ; mais nous ne sommes pas au bout de nos peines. Puisqu’on nous dit que c’est pour notre bien… Un cadavre, fût-ce celui de l’Europe, c’est toujours bon à recycler. A combien la livre ?
(1). Edition du 27 décembre. Bonnal Nicolas

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